REPRODUCTION

Les microbiomes ont un impact important dans le domaine de la reproduction, d’une part sur la fécondité féminine et la fécondité masculine, d’autre part sur les protocoles de procréation médicalement assistée.

L’impact des microbiomes sur le déroulement de la grossesse est détaillé dans l’onglet grossesse.

Microbiomes et infertilité féminine

Le microbiome intestinal joue un rôle important dans la régulation des hormones sexuelles.

L’axe bidirectionnel cerveau-intestin joue un rôle dans le déclenchement de la puberté par l’intermédiaire de neurotransmetteurs agissant sur la production hormonale. A contrario, les hormones sexuelles modèlent le microbiote intestinal avec des différences marquées à partir de la puberté entre hommes et femmes.

• Microbiome intestinal et Syndrome des ovaires polykystiques (SOPK) : le SOPK est une cause reconnue d’infertilite.
Une diminution de l’α diversité et des changements dans la β diversité particulièrement dans le phylum Firmicutes ont été observés au cours des SOPK. Le problème est que l’hyperandrogénie et la résistance à l’insuline caractéristiques du SOPK induisent des modifications dans la composition du microbiome intestinal ; si bien qu’il est difficile de savoir si la dysbiose précède ou est une conséquences du SOPK. Des études en pré-adolescence serait nécessaires pour préciser ce point

• Microbiomes et endométriose (cf Fig 1) : cette pathologie touche entre 6 et 10 % des femmes en âge de procréer. On distingue l’adénomyose (endométriose interne à l’utérus) et l’endométriose externe à l’utérus (lésions à distance). 4 stades définissent la gravité de l’endométriose (classification de l’American Society of Reproductive Medicine) :
➔ Stade I : endométriose minime
➔ Stade II : endométriose modérée
➔ Stade III : endométriose moyenne
➔ Stade IV : endométriose sévère
Des facteurs génétiques interviendraient dans environ 1 cas sur 2.

Une concordance existe entre endométriose et maladies inflammatoires intestinales accréditent la piste de la dysbiose intestinale. Les modifications observées au sein du microbiote intestinal diffèrent selon les études :
➔ Augmentation des phylum Actinobacteria, Firmicutes, Proteobacteria et Verrucomicrobia chez avec diminution des Lactobacillaceae
➔ Dominance d’E. coli et Shigella dans stades ¾
➔ Risque accru en cas d’endométriose lié à l’abondance de Bacillales, Prevotellaceae, Anaerotruncus, Olsenella

Le microbiote cervico-vaginal présente également des modifications chez les femmes porteuses d’une endométriose :
➔ Diminution de la quantité de Lactobacilles et augmentation des bactéries associées à la vaginose
➔ Diminution de la richesse et de la diversité du microbiote cervical parallèle à la sévérité de l’endométriose, à l’intensité des douleurs et au taux d’infertilité
➔ Plus grande fréquence d’HPV chez les femmes avec endométriose.

Le lien entre microbiote et infertilité féminine a été établi au décours d’Infections Sexuellement Transmissibles (IST). Chlamydia trachomatis, Neisseria gonorhoeae et Mycoplasma genitalium sont, en effet, responsables d’infections génitales hautes (IGH : endométrite, inflammation pelvienne, obturation tubaire). Or ces IST sont favorisées par la dysbiose vaginale.
Mais indépendamment des IST, les bactéries associées à la vaginose (BAV) peuvent être directement responsables d’IGH. Les femmes infertiles ont 3 fois plus de risque de présenter une vaginose bactérienne que les femmes fertiles.

Plusieurs mécanismes sont évoqués pour expliquer le lien entre vaginose et infertilité féminine :
➔ Les BAV induisent une activation immunologique par l’intermédiaire de la maturation de cellules dendritiques ainsi qu’une augmentation de cytokine pro-inflammatoires qui conduisent à une inflammation des tissus du tractus génital.
➔ Certaines BAV sécrétent des enzymes hydrolysantes comme des sialidases qui altèrent le mucus cervico-vaginal et augmentent d’une part l’adhésion des BAV aux muqueuses génitales (biofilms) ainsi que la perméabilité cervicale favorisant ainsi l’ascension de BAV dans le tractus génital haut.
➔ Au sein de ces BAV, Prevotella spp joue un rôle majeur dans les conséquences de la dysbiose sur la fertilité féminine.

Microbiomes et fécondité masculine

Plusieurs études montrent que le sperme possède un microbiote diversifié spécifique.

Ce microbiote est composite car il regroupe des micro-organismes des testicules, des épididymes, de la prostate, des vésicules séminales et de l’urètre. Il est également influencé par des micro-organismes des partenaires sexuels.

La composition de ce microbiote varie selon les études avec constatations :
• Il existe de grandes variations individuelles dans la composition de ce microbiote
• On peut identifier des clusters bactériens dominés des espèces particulières.

Les clusters les plus fréquents (méthodes NGS) sont dominés par Lactobacillus, par Prevotella et par Pseudomonas, le cluster dominé par lactobacillus étant plus fréquent chez les hommes avec un sperme normal.

Même s’il existe encore quelques divergences dans les études, il apparaît que Lactobacillus est associé à une bonne qualité du sperme alors que d’autres bactéries (essentiellement Prevotella) sont associées à l’infertilité masculine (cf Fig 2 et Fig 3)

L’obésité et le surpoids impactent négativement la qualité du sperme. Les régimes riches en graisse et les régimes « occidentaux » modifient le microbiote intestinal avec une abondance relative de Bacteroides, Prevotella.  Ces dernières ont un impact négatif sur la qualité du sperme.

Microbiomes et PMA

Au cours des processus de FIV, même si la qualité des embryons est optimale, les chances de grossesse dépendent grandement de la qualité de l’endomètre.
Si la composition d’un microbiome endométrial optimal est encore discutée, l’impact du microbiote cervico-vaginal sur le déroulement de la FIV est, quant à lui, bien étudié.

Des études ont montré que ce traitement induisait une diminution significative du taux de lactobacilles vaginaux  ayant mené chez certaines femmes à l’apparition d’une vaginose bactérienne (non significatif).

Plusieurs études ont confirmé le rôle positif de Lactobacillus crispatus sur les succès d’implantation et sur le taux de grossesses au cours des FIV. (cf Fig 4)

A contrario, Lactobacillus iners et Streptococcus étaient plus abondant chez les femmes en échec d’implantation

Le risque de contamination dans le recueil des échantillons endométriaux et la faible biomasse de ce microbiote expliquent l’hétérogénicité des résultats d’études.

Une étude récente montre une moins grande diversité bactérienne endométriale chez les femmes avec échec d’implantation mais pas de différence au niveau des genres bactériens dans l’endomètre.

L’échec d’implantation pourrait s’expliquer soit par la présence de pathogènes au niveau de la cavité endométriale, soit par des réactions inflammatoires suscitées par une dysbiose vaginale.

Schémas

Fig 1 : schéma des interactions microbiomes et endométriose. (D’après Ser HL, Au Yong SJ, Shafiee MN, Mokhtar NM, Ali RAR. Current Updates on the Role of Microbiome in Endometriosis: A Narrative Review. Microorganisms. 2023 Jan 31;11(2):360. doi: 10.3390/microorganisms11020360. PMID: 36838325; PMCID: PMC9962481.)

 

Fig  2 : Composition du microbiote séminal et fertilité masculine. D’après Neto FTL, Viana MC, Cariati F, Conforti A, Alviggi C, Esteves SC. Effect of environmental factors on seminal microbiome and impact on sperm quality. Front Endocrinol (Lausanne). 2024 Feb 22;15:1348186. doi: 10.3389/fendo.2024.1348186. PMID: 38455659; PMCID: PMC10918436.)

 

Fig 3 : Composition du microbiote séminal, fertilité et influence sur la grossesse. D’après Neto FTL, Viana MC, Cariati F, Conforti A, Alviggi C, Esteves SC. Effect of environmental factors on seminal microbiome and impact on sperm quality. Front Endocrinol (Lausanne). 2024 Feb 22;15:1348186. doi: 10.3389/fendo.2024.1348186. PMID: 38455659; PMCID: PMC10918436.)

Fig 4 : Mcrobiote vaginal chez des femmes avec échecs répétés d’implantation (RIF) vs femmes contrôle. (D’après Fu M, Zhang X, Liang Y, Lin S, Qian W, Fan S. Alterations in Vaginal Microbiota and Associated Metabolome in Women with Recurrent Implantation Failure. mBio. 2020 Jun 2;11(3):e03242-19. doi: 10.1128/mBio.03242-19. PMID: 32487762; PMCID: PMC7267891.)

Définitions

• Fertilité : capacité d’un homme ou d’une femme à concevoir

• Hypofertilité : diminution partielle de la fertilité nécessitant une augmentation du délai pour concevoir

• Infertilité : diminution de la capacité d’un homme, d’une femme ou d’un couple à concevoir (selon l’OMS on parle d’infertilité après 12 mois de rapports réguliers, non protégés, sans grossesse)

• Stérilité : impossibilité définitive d’avoir un enfant naturellement (azoospermie ou obturation tubaire bilatérale, par exemple)

  • Microbiomes puberté, SOPK et endométriose
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